Cybèle Idelot
©Saragoussi

Paroles de boulonnais

Cybèle Idelot, une histoire de cheffe

J’ai toujours aimé cette place Jules-Guesde, on a toujours cru dans ce quartier

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Globe-trotteuse, autodidacte, américaine de naissance et boulonnaise convaincue, la cheffe Cybèle Idelot poursuit sa quête des produits naturels et des goûts justes. Depuis son ouverture en 2013 rue de Meudon, le restaurant La Table de Cybèle attire une clientèle curieuse de voyages gustatifs inédits.

Son nom circule de plus en plus dans les milieux gastronomiques, où son chemin singulier attire l’attention. Pourtant, Cybèle Idelot est loin des plateaux télé et des brigades hiérarchisées. Installée sur la terrasse du restaurant avec son mari Frank, rue de Meudon, elle raconte son envie «  de faire plaisir aux clients, de mettre des étoiles dans leurs yeux  ». Cette autodidacte discrète, au sens de l’humour aiguisé, est née près de San Francisco, la ville cool de l’Ouest américain, dans une maison avec un potager. Cuisiner est une affaire de famille. Sa mère et sa grand-mère aux fourneaux lui transmettent leur passion pour les produits locaux, le rythme des saisons. «  Manger sainement, respecter la nature, vivre en cohésion avec elle, c’est mon ADN  », explique Cybèle. L’autre influence qui teinte fortement la cuisine familiale, c’est la France. Sa maman a vécu à Paris. C’est d’ailleurs dès 16 ans que Cybèle met le cap sur la Bretagne pour un échange, prélude à plusieurs autres.

Rue de Meudon depuis 2013

Avec ce bagage, après des études d’art, elle part jouer les globe-trotters. Aux Antilles, à 24 ans, l’évidence la rattrape : elle est faite pour cuisiner, devient chef privé. Après l’expérience d’une ouverture de restaurant dans les Hamptons, près de New York, où elle s’attire les louanges du New York Times, elle reprend sa liberté, peaufine son style, organise soirées privées et événements dans la Grosse Pomme. En 2006, en vacances à Paris, elle rencontre Frank. Il est boulonnais, travaille dans le digital, et vient d’une famille champenoise. Le vin est sa passion : « Alors vous comprenez, dit-il en riant, quand j’ai rencontré une cuisinière…, on a parlé le même langage!  » Quelques allers-retours plus tard, elle le rejoint, ils se marient. Quand ils imaginent « leur  » restaurant ensemble, ce ne peut être qu’à Boulogne-Billancourt, pas loin de  leur  domicile. Ils trouvent ce qu’ils cherchent rue de Meudon, et ouvrent en 2013. «  S’installer dans ce quartier, c’était un peu un pari, il n’y avait pas encore beaucoup d’établissements  », commente Cybèle. Et d’ajouter :

J’ai toujours aimé cette place Jules Guesde, on a toujours cru dans ce quartier, on y est toujours bien. 

Le mercredi matin, au marché de Billancourt

Le public suit, en grande partie boulonnais, venant aussi de l’Ouest parisien et de la capitale. Appréciant la jolie salle ouverte sur la rue et les arbres du parc des Glacières; la table centrale où peuvent s’attabler 12 convives; et aussi la carte de vins sur laquelle Frank n’inscrit que des vins «  nature  », des pépites que cet enthousiaste aime faire découvrir. Quant à la cheffe, son exigence se voit dans l’assiette, on y devine des produits sélectionnés avec soin : du local, des petits producteurs, des variétés originales… « Pas de poissons de la Méditerranée, pas d’élevage, seulement des poissons de ligne, par des artisans pêcheurs, détaille-t-elle. Le mercredi matin, nous nous arrêtons au marché Billancourt pour les volailles de la ferme du Luteau. Et, bien entendu, le pain vient de chez Thierry Meunier, au coin de la rue.  » Il y a trois ans, Cybèle et Frank ont cherché un lopin de terre pour y créer le potager de leurs rêves. Ils l’ont trouvé à Gambais (78). Ils y ont ouvert des chambres d’hôtes et une table, y cultivent leurs légumes et plantes qui seront servis dans le restaurant. La cheffe s’en inspire pour la présentation de ses plats :  

Je réfléchis à l’expérience, j’essaie de montrer le chemin de la dégustation.

En femme de conviction, elle assume «  une démarche de recherche permanente. Je cherche le goût unique. J’utilise les méthodes ancestrales: lacto-fermentation, fumage salage… Oui, c’est beaucoup d’énergie, mais c’est ma passion. » Cybèle s’emploie à ne rien jeter, tout est bon dans les produits de la terre. Elle recycle les fanes de carottes, les épluchures de pommes de terre deviennent une glace, les arêtes de poisson fumé, un bouillon… L’automne va lui permettre de décliner les sept variétés de tomates différentes cultivées avec amour, de mettre à la carte des maïs arc-en-ciel, des courges, des choux kalé et de décorer ses assiettes avec des hélianthes et des soucis qui se croquent. Elle écoutera très attentivement les réactions de ses clients, qui la guident, et retournera en cuisine à la recherche de nouvelles saveurs. La quête du bon prend du temps.