portrait de Danielle Bombardier
@Alain de Baudus

Paroles de boulonnais

Danielle Bombardier, "maman" du tennis français

Boulogne-Billancourt est devenue mon village. Inconsciemment, j’y ai recréé l’atmosphère festive et solidaire que j’avais goûtée à Rabat.

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Boulonnaise depuis 1963, Danielle Bombardier est une figure du tennis. Responsable de l’accueil des joueuses et des joueurs à Roland-Garros de 1973 à 1983, la Boulonnaise continue, à 82 ans, d’officier sur les tournois organisés en France. Dans son livre 50 ans dans les coulisses du tennis mondial, elle partage ses souvenirs avec la formidable franchise qui la caractérise. 

Échanger du tac au tac avec Danielle Bombardier, c’est un peu comme monter à la volée et tenter d’intercepter les passing-shots. Ça fuse ! Avec elle, c’est toute une époque majeure du tennis mondial qui refait surface, celui des années 1970 et 1980 avec les Borg, Vilas, Nastase, Wilander, McEnroe ou Noah. Surtout Noah !

Yannick m’a encouragée à écrire ce livre sur ma carrière. Quand je l’ai vu pour la première fois à Roland-Garros, il n’avait que 13 ans. Sa mère, Marie-Claude, est devenue ma meilleure amie. 

Sur la table basse dans son appartement boulonnais, elle empile les photos de sa collection personnelle tout en les commentant. Connue pour son franc-parler, elle n’hésite pas à égratigner certaines idoles, fustigeant leur comportement. Connors ou Agassi, par exemple, en prennent pour leur grade, tandis que d’autres sont encensés : Pat Rafter, Adriano Panatta…

Ancienne joueuse elle-même, Danielle a débuté le tennis au Maroc, où elle a vécu ses dix-sept premières années. "Mon père présidait l’OM, glisse malicieusement cette supportrice du PSG, avant de préciser qu’il s’agissait de l’Olympique marocain. Nous avons rejoint la France en 1957, un an après l’indépendance, et j'ai épousé un tennisman, Jean-Pierre Bombardier."  Elle emménage à Boulogne-Billancourt en 1963 et, parrainée par le mousquetaire Henri Cochet, adhère au Tennis Club de Paris, situé à proximité.

Boulogne-Billancourt est devenue mon village. Mes filles habitent le même immeuble. De nombreux joueurs de tennis français y résident également, la proximité de Roland-Garros expliquant ce drôle de regroupement familial. Inconsciemment, j’ai recréé à Boulogne-Billancourt un peu de l’atmosphère festive et solidaire que j’avais goûtée à Rabat. » 

"Nastase m'appelle toujours Maman"

En 1973, bien intégrée dans le milieu tennistique, Danielle est chargée par la Fédération française de Tennis de l’accueil des joueurs pour les différents tournois. Son bureau se trouve porte 11, au stade Roland-Garros. "Comme je détenais les précieuses invitations, j’étais la personne la plus recherchée de Roland-Garros !"  Elle y restera dix ans, de la victoire de l’ancien Boulonnais Ilie Nastase en 1973 – "il habitait avenue Robert-Schuman, et m’appelle toujours maman" – à la consécration de Noah en 1983. Depuis, la Boulonnaise met ses talents au service de nombreux tournois : Anvers, puis Lyon, Bordeaux, Cagnes-sur-Mer… Elle suit l’évolution de tous les joueurs de la nouvelle génération, ne loupe pas un match et avoue apprécier l’US Open jusqu’à pas d’heure.

Je "kiffe" Nadal et Federer. Ils ont été bien éduqués. Sur le terrain, Nadal est la perfection, et en dehors, il est toujours disponible. Federer, c’est l’élégance, la gentillesse incarnée.

Elle considère l’ensemble des joueurs français comme ses enfants, ses chouchous. "Je les ai tous connus à leurs débuts et je les croise toujours sur les tournois."  Avant de repartir travailler sur le Moselle Open à Metz, fin septembre, elle confie "souhaiter voir un Français gagner de nouveau un Grand Chelem. Gaël Monfils aurait pu, lui qui sait mettre le public dans sa poche."  Entre deux tournois, Danielle profite de la douceur de son quartier, privilégie les commerçants de proximité, qu’elle connaît tous, fréquente les restaurants près de chez elle. 

Je ne pourrais pas vivre ailleurs, confie-t-elle. Depuis 1963, j’ai déménagé à plusieurs reprises, mais toujours à Boulogne- Billancourt.

Cette passionnée de sport aime se remémorer les soirées foot entre amis dans ses appartements boulonnais successifs. L’épopée des Verts, puis les succès du PSG? quand elle habitait rue de Paris. En 2020, malgré la crise sanitaire, Danielle a pu revoir ses amis à Boulogne-Billancourt pour préparer son autobiographie. "Avec Yannick, ce bouquin nous a fait vivre le confinement dans la joie."  Dans le livre d’or figurant à la fin de l’ouvrage, où de nombreux joueurs louent la gentillesse de Danielle, Julien Benetteau a écrit ces quelques lignes :

J’ai eu la chance de vivre cinq ans dans son immeuble, à Boulogne-Billancourt. Quand je n’allais pas bien, quand j’avais des soucis dans mon appartement, j’allais la voir et, avec son mari, ils venaient résoudre les problèmes. Voilà, Babie, tout ce qu’elle est pour moi."