Paroles de boulonnais

Hélène Moreau

Lauréate du prix L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science

Le samedi, nous allons souvent à la ludothèque, on fait notre petit tour de Boulogne-Billancourt, on aime la ville !

Publié le

Installée à Boulogne-Billancourt depuis 2012, Hélène Moreau, 33 ans, chercheuse à l’Institut Curie, a décroché en octobre dernier le prestigieux prix L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science.

Comme Obélix dans sa marmite, elle est tombée, petite fille, dans un tube à essai. Il faut dire qu’à la maison, à Saint-Clément-la-Rivière près de Montpellier, le terrain s’avère propice à toutes les expériences. Papa, chimiste, est chercheur au CNRS et maman professeur de chimie. Hélène se souvient des petits modèles moléculaires qu’elle aimait assembler avec son frère et sa soeur, un jeu d’enfant. «   L’expérience est un univers fascinant, tout comme l’observation des processus biologiques, glisse en souriant la jeune femme. Voir comment un organisme se construit à partir d’une seule et minuscule cellule est assez magique,
non ?
   » À l’issue d’un parcours brillant – École normale supérieure de Paris en 2006, agrégation de biochimie-génie biologique, puis une thèse en immunologie –, Hélène Moreau a fait de la recherche son métier, et de l’infiniment petit son terrain de jeu quotidien. Spécialiste de l’immunologie fondamentale, elle travaille sur la migration des cellules immunitaires au sein du laboratoire Inserm Immunité et Cancer à l’Institut Curie.
«   J’essaie de comprendre comment les propriétés physiques des tissus, leur rigidité, leur organisation, peuvent modifier la migration des cellules   », explique-t-elle. Son nouveau projet cible particulièrement la question des tumeurs, à l’heure où l’immunothérapie, couronnée par un prix Nobel en 2018, a été mise sur le devant de la scène. «   On sait que les tumeurs persistent parce que notre système immunitaire n’arrive pas à les éliminer. Plutôt que de tenter de les détruire de manière massive par chimio ou radiothérapie, une autre approche consiste à booster le système immunitaire pour qu’il élimine lui-même très spécifiquement les tumeurs, ce qui entraîne moins d’effets secondaires.   » Encore faut-il que les «  bonnes  » cellules entrent à l’intérieur de la tumeur et s’y attaquent. Pourquoi certaines y parviennent-elles et d’autres non ? L’un des axes de la recherche fondamentale actuelle.

Humble et discrète, elle a découvert les feux des projecteurs en octobre dernier, en devenant lauréate, avec 29 autres chercheuses, du prestigieux programme L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science, synonyme
d’aide financière, mais pas seulement. «   C’est une forme de reconnaissance pour moi et aussi pour le laboratoire  », concède-t-elle modestement. L’obtention du prix s’est doublée d’une formation en management, en communication, en gestion de carrière, «  un gain de temps précieux   » dans la vie de jeune maman d’un petit Elliott, 2 ans, tenue de voyager, d’assister à des congrès…

«   J’ai eu le bonheur d’avoir une place en crèche, raconte Hélène, c’est vraiment idéal car mes horaires de travail ne seraient pas vraiment compatibles avec ceux d’une assistante maternelle. Mon fils découvre la vie en collectivité, il adore, c’est génial.  » Les «  traditionnelles promenades du samedi  », le «  petit tour dans Boulogne-Billancourt : on aime la ville !  », mènent souvent la petite famille à la ludothèque du Trapèze. Le bout de chou a aussi goûté à sa première heure du conte à la médiathèque Landowski.

«   Il était en compagnie d’une dizaine d’enfants. L’animation alterne histoire et musique. Ce n’est pas trop long, 20-25 minutes, bien adapté à leur âge, vraiment super.   » La chercheuse, qui se plaît à accueillir des jeunes à l’Institut Curie avec ses collègues, a d’ailleurs d’autres projets liés à l’enfance : un livre de vulgarisation scientifique ou pourquoi pas, un film en animation stop motion dans l’esprit du dessin animé Il était une fois la vie.

Le musée jardin Albert-Kahn – dont la partie jardin rouvre en septembre – constitue un autre centre d’intérêt pour cette spécialiste de l’imagerie et son mari, également chercheur. En marge de ses activités, elle rêverait de susciter un hommage ou une exposition à Jean Comandon (1877-1970), dont le laboratoire fut financé par Albert Kahn. Injustement méconnu, inventeur de la microcinémathographie en couplant
microscopes et caméras, Comandon fut le premier à montrer des cellules animales en mouvement ou
bien la croissance des végétaux, images des plus magiques aptes à créer des vocations…