Paroles de boulonnais

Linda Lee Hopkins

I love this city, il y a la Seine, les parcs. À Paris, trop grande ville pour moi, je suis stressée. Quand je reviens à Boulogne, je respire…

Boulogne, I love you !

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La scène se passe lors du vernissage de l’exposition Maurice Renoma Art Tribute à l’espace Bernard-Palissy. Se dirigeant vers l’hôte des lieux, Linda Lee Hopkins entame a cappella What a wonderful world, popularisé par Louis Armstrong. Le silence se fait, un ange passe. «   C’est un grand monsieur, je l’adore, sourit la chanteuse. Il m’a invitée ensuite au Café Renoma. Le feeling est passé…  » Ainsi est Linda Lee Hopkins : spontanée, chaleureuse, toujours prompte à échanger avec les Boulonnais qu’elle croise, les commerçants… Elle rit : «   Je suis un peu comme une ambassadrice ici.Boulogne, I love you !   »

Installée à Boulogne-Billancourt depuis vingt et un ans, Linda Lee Hopkins est née aux États-Unis, en Caroline du Nord, puis a grandi dans le Delaware. Le domicile familial baigne dans le gospel. «   Mon père (prénommé Robert, NDLR) avait un groupe qui répétait à la maison. Il sillonnait le pays, chantait pour le plaisir, pour remercier le Seigneur, pas pour l’argent. Il avait une voix d’or. Il n’est plus de ce monde mais c’est toujours mon étoile.   » La jeune femme hérite du don paternel, écoute Aretha Franklin, Marvin Gaye, Diana Ross, commence, à 27 ans, à se produire dans les casinos de la côte Est. Un peu à l’étroit dans le Delaware, on la retrouve ensuite aux Antilles, sur l’île de Saint-Martin. Elle y rencontre un séduisant gendarme français. Elle finit par le rejoindre dans l’Hexagone. Elle rit : «   Eh oui, au début j’ai habité dans une caserne de la gendarmerie nationale, à Drancy !   »

La suite était écrite. Aux premiers concerts avec un groupe français, rue de la Roquette à Paris – «   on cassait la baraque  », sic – succède une rencontre déterminante. Choriste, elle part sur les routes avec Herbert Léonard, artiste de la compagnie WEA, la même que le grand Al Jarreau avec qui elle travaillera aussi, un temps. Linda Lee est très demandée. Sur scène, sur disque ou dans les shows télévisés, on la croise avec Nino Ferrer, Michel Jonasz, Eddy Mitchell, Bernard Lavilliers, Marc Cerrone, etc. Elle assure aussi la première partie de Prince, à Paris, en 1994 !

L’artiste intègre la formation Gospel pour 100 voix, dont elle deviendra directrice artistique jusqu’en 2011, innombrables tournées et sept «  Bercy  » à la clé. Linda Lee est aussi la voix des tubes de Bob Sinclar The Beat Goes On, The Soundz of Freedom, et participe, sur cette lancée, à l’émission «  The Voice  ». «   J’étais une professionnelle, j’ai fait ça pour le buzz. Qui renoncerait à chanter devant 10 millions de téléspectateurs ? argumente-t-elle. Les jours qui ont suivi, j’étais tout le temps interpellée dans les rues de Boulogne, aux Passages ou ailleurs : “Hey, on vous a vue à la télé !”   »

Elle côtoie Gloria Gaynor, Percy Sledge. Mais c’est un simple coup de téléphone qui compte parmi ses souvenirs les plus forts. Linda Lee remporte, en France un concours d’arrangements en vue de l’enregistrement futur du titre Imagine de John Lennon par un certain… Ray Charles (dont le producteur d’alors, Jean-Pierre Grosz, est Français). «   Le producteur me tend son téléphone, “quelqu’un veut te parler”, c’était Ray Charles, raconte-t-elle émue. It was crazy et émouvant car on venait d’apprendre qu’il était très malade. “Ohhh Girl, you sang that song”, he says to me. Il avait la même voix que mon père. Je parlais au Genius et c’est comme si je parlais avec mon père là-haut, au ciel…   »

Mais Linda Lee Hopkins, qui a aussi joué quelques rôles au cinéma, a également les pieds sur terre. Vous la verrez peut-être dans son resto favori le Pedra Alta, et surtout arpenter la ville, entre deux sessions musicales, chaussures de sport au pied. Boulogne-Billancourt dont elle connaît chaque recoin. «   Je peux faire 10 km en une journée, je pars de Rhin-et-Danube, où j’habite, et je marche, en toute sécurité. I love this city, il y a la Seine, les parcs. À Paris, trop grande ville pour moi, je suis stressée. Quand je reviens à Boulogne, je respire !  »

Récemment, l’artiste a donné une masterclass dans un conservatoire de GPSO, à Vanves. Son secret ? «   Je n’ai jamais pris de cours de ma vie. Il faut simplement chanter avec une vraie émotion, et, dans mon cas, la croyance. Je dis aux élèves que ma musique, c’est mon sang. Je chante avec tous les éléments de mon corps, mes épaules, mes yeux, je veux partager…  » En attendant, un jour, peut-être, de se produire dans sa lovely ville d’adoption, Linda Lee Hopkins planche sur son prochain album coécrit avec Christophe Lardeau, le guitariste compositeur de Ben L’Oncle Soul («   Ben, c’est comme mon petit frère   », dit-elle). Au programme, 14 titres originaux dont on reparlera…