Paroles de boulonnais

Renaud Chantegrelet, croire en ses rêves

Il a été le premier restaurateur à s’installer dans le Trapèze en 2009. Depuis, le Boulonnais Renaud Chantegrelet, paraplégique, a ouvert de nouveaux établissements. Et réalisé son rêve, devenir pilote d’hélicoptère.

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Renaud Chantegrelet est paraplégique depuis l’âge de 14 ans à la suite d’un accident de moto. En 2009, âgé de 25 ans, il ouvre avec une belle dose d’audace son premier restaurant et s’installe dans ce qui est alors un immense chantier, le nouveau quartier du Trapèze.

Pari réussi, le Café Renaud devient très vite un rendez-vous couru des amateurs de bonne chère et d’atmosphère chaleureuse. Il en ouvre deux autres (à Issy-les-Moulineaux et à Antony), tous gérés avec une énergie hors du commun par ce fou de travail. Il emploie aujourd’hui 90 personnes dans ses établissements, ouverts 7 j/7 de 7h à 2h du matin, c’est sa marque de fabrique.

Il confie dans un sourire qu’il ne compte pas s’arrêter là, "d’autres projets sont en cours." Dans la ville ? Oui, mais chut… Belle réussite, peut-on dire déjà, pour ce petit-fils de bougnat auvergnat, originaire de l’Aubrac, qui a toujours eu la restauration en ligne de mire. Impressionnante démonstration de volonté aussi pour cet homme toujours en mouvement, qui passe d’un restaurant à l’autre au volant de sa voiture, après y avoir plié son fauteuil.

"J’ai toujours voulu avoir le plus d’autonomie possible. Dans la vie, plus on t’assiste, plus tu en as besoin."

Il salue cependant l’appui qu’il a constamment reçu de la ville. Lors de son installation, Henri Ricard, alors adjoint au maire, auvergnat comme lui, "lui a mis le pied à l’étrier ". Depuis, il a vu le quartier évoluer vers plus d’accessibilité : "Le plaisir dans ce quartier c’est, pour moi, de pouvoir entrer dans les parcs. Les travaux de rénovation du pont de Sèvres ont été bien faits, je peux aller chez les commerçants sans problème. Ça allège la vie quotidienne."

Le rêve d'Icare

Renaud a toujours voulu voler. Pour raconter cette passion de l’air qui le remplit, il évoque ces mois où, cloué au lit à l’hôpital de Garches, entre deux lourdes opérations, il imagine le moment où il décollera. Il a en tête le souvenir des hélicos qu’il voyait enfant quand il passait le long de l’héliport d’Issy : "Un rêve inaccessible." 

Et pourtant, à 18 ans, au moment où il ouvre un premier commerce, il vole, enfin, avec un parapente, "petit moteur et voile dans le dos".  Il passe ensuite à l’ULM pendulaire. Des machines qui se pilotent avec les mains… Il apprend alors qu’un aéroclub, aux Mureaux, s’est spécialisé dans le vol pour personnes à mobilité réduite : les appareils ont subi les transformations nécessaires, le palonnier (les pédales) est supprimé au profit d’un "malonnier". Renaud a trouvé son Graal : il devient pilote breveté avion. Il aurait pu s’arrêter là, tracer sa route dans le ciel. Ce serait mal connaître sa capacité à poursuivre son rêve, l’hélicoptère, une inaccessible étoile, comme disait Brel, qui lui aussi volait…

Premier pilote d'hélico au monde porteur de handicap 

"Jamais un hélico n’avait été piloté par une personne handicapée. Tout le monde me disait que c’était impossible d’adapter un appareil au pilotage avec les mains, que l’on n’aurait jamais l’homologation. Avec toute une bande de copains, on a acheté une Alouette 2. On a développé un système et déposé les plans à la DGAC*."

Du temps, de l’énergie et de belles amitiés, voilà la recette de Renaud, qui a obtenu la certification de l’appareil et le premier brevet de pilote d’hélicoptère au monde attribué à une personne handicapée. Depuis, dans son Alouette, il parcourt la France. Et, souvent, il n’y est pas seul. Sous le label de l’association qu’il a fondée, Les Ailes de l’Aubrac, il emmène bénévolement voler des enfants en situation de handicap. " Pour ces enfants, voler avec un pilote qui est, comme eux, en fauteuil roulant, ça leur donne des ailes. À moi aussi. "

Un tout nouveau projet l’anime. Transformer un autre appareil, une Gazelle, pour ensuite faire un tour de France à plusieurs et faire rêver et voler encore plus de jeunes et de moins jeunes, en lien avec les associations de personnes handicapées. Ça prendra un peu de temps, mais l’homme pressé est capable d’être patient pour convaincre…

* Direction générale de l’aviation civile